La méditation
La méditation prend notre société à contre-courant. Toujours plus vite, toujours plus fort, toujours plus haut… associé à nos modes de vie actuels, cela équivaut souvent à toujours plus de consommation. Toujours plus. Et là, au détour de nos pérégrinations et autres bavardages, on croise la méditation qui nous dit stop. Ralentis, calme.
Ce qui m’intéresse aujourd’hui c’est de dire quelques mots sur cet état de vacuité auquel on aspire dans la pratique de la méditation.
Ma première rencontre avec un méditant se fit au milieu de chats dans un cadre magnifique, il y a quelques années maintenant. En gagnant la salle dédiée, je posai la question qui s’impose : qu’est-ce que la méditation ? On me répondit : « assieds-toi ici s’il te plait ».
N’ayant pas compris qu’il s’agissait de la réponse, je me suis exécuté et j’ai reformulé ma question. J’ai reçu la même réponse, parée d’un petit sourire malicieux. Après une courte initiation, nous embarquons pour quelques minutes de pratique à l’issue desquelles nous discutons un peu.
Une question m’est adressée : « As-tu réussi à t’asseoir ? »
Je vous laisse imaginer mon air pantois…
Et de rajouter : « Je veux dire t’asseoir, seulement t’asseoir »
Il me semblait que oui… et pourtant…
«Es-tu sûr de t’être assis sans t’être posé la question de comment faire ? En ayant pour seule pensée cette action ? »
En y prêtant un peu attention, on s’aperçoit que l’on fait de nombreuses choses en s’asseyant. Il y a l’action mécanique bien sûr, à laquelle se superpose le bavardage mental : quel temps fait-il ? Que vais-je faire à manger en sortant ? Vais-je bien faire ? Qu’est-ce que je suis mal assis !
Dans leur grande majorité, ces pensées durent très peu de temps et nous n’en prenons pas conscience. Ceci est un point important de la méditation : se rendre compte à quel point notre esprit est occupé ou plutôt encombré. Il reflète de façon continue des pensées, des sentiments, des émotions. Tout ceci en lien avec notre histoire, notre vécu actuel, nos perceptions sensorielles.
La méditation, c’est le processus qui va consister à écoper notre embarcation de tout ce fatras mental. Ainsi, nous sommes conviés progressivement d’un fonctionnement lourd et lent, à un fonctionnement vif et léger.
Pour imager le principe, il s’agit de laisser couler nos ressentis, pensées et autres semblables comme des gouttes d’eau se dirigeraient dans la rivière, qui rejoindrait le fleuve puis l’océan. C’est-à-dire qu’il n’y a rien d’autre à faire qu’être là… seulement être là.
« Ne rien faire » revient en l’espèce, à développer certaines qualités parmi lesquelles l’immobilité, la stabilité, la patience.
L’immobilité, c’est le corps qui ne bouge pas mais aussi les émotions. Ce qui se traduit notamment par une respiration qui s’approfondit puis se suspend de plus en plus souvent, de plus en plus longtemps. D’où l’importance du corps dans l’expérience de la méditation.
La stabilité, parce que c’est dans la durée que s’installe un état méditatif. On ne fait rien puis avec le temps ça bascule… ou pas. Tout se fait sans effort ni contrainte. Cela dure ce que cela dure. Quelques secondes, quelques minutes ou plus… Ou cela ne viendra pas aujourd’hui.
La patience, car, plus on cherche à y parvenir plus on s’en éloigne. Le zen parle de l’esprit « mushotoku » comme la condition d’accès à la méditation. Terme que l’on traduit habituellement par « sans objet, sans but ni esprit de profit »
Pourquoi la méditation ?
Pourquoi rester immobile ? Pourquoi être stable ? Pourquoi patienter ?
Expérimenter la méditation c’est expérimenter un instant sans se préoccuper de quoi que ce soit, c’est pour beaucoup de l’inédit. Cela signifie vivre au présent, ici et maintenant. C’est-à-dire faire un véritable pied de nez à notre illusion du contrôle permanent.
En conclusion
Méditer est exigeant et demande de l’assiduité. Facile ? Oui et non. Accessible, certainement… à qui accepte un minimum d’investissement personnel.
Chaque tentative n’est pas synonyme de réussite, d’ailleurs cela ne saurait être un but en soi. En travaillant, de plein de façons différentes, sur les qualités vues précédemment et quelques autres, on augmente nettement nos possibilités de plonger dans cet état régulièrement et surtout de plus en plus longtemps.
L’état méditatif est ainsi un état d’abandon de tout ce qui nous constitue, l’espace d’un instant plus ou moins long. Il induit un sentiment profond de calme et de sérénité. Puis, à plus de recul dans sa vie, une meilleure compréhension des expériences qui jalonnent l’existence. Et qui sait, peut être même deviendrait-on un peu plus sages… au moins le temps de la méditation.
Une petite précision qui me semble nécessaire aujourd’hui, car on entend beaucoup parler de « méditation laïque » à l’heure actuelle. Bien qu’utilisés depuis leur naissance par les religions, il convient de préciser que les « états méditatifs » n’ont aucun lien spécifique avec la religion. Les techniques méditatives sont, par ailleurs, étudiées et appliquées depuis bien longtemps dans le yoga qui n’a pas attendu les institutions religieuses pour se mettre au travail…
Maintenant un peu d’apprentissage technique, un bon tapis et je vous souhaite une bonne expérience !